La presse du Lot : pour un aperçu historique

La généralité de Montauban (ou Haute-Guyenne) est scindée sous la Révolution en deux départements : Lot à l'ouest et Aveyron à l'est. Tel qu'il est créé en février 1790, le département du Lot confine au sud avec la Haute-Garonne ; il unit le Bas-Quercy (Montauban, Moissac), où le protestantisme s'était développé, et le Haut-Quercy (correspondant au diocèse de Cahors), resté catholique. Cahors étant situé au centre de cet espace, c'est là qu'on établit le chef-lieu, bien que Montauban soit alors plus peuplé et plus dynamique : avant 1790, cinq journaux ont paru à Montauban, aucun à Cahors. Juste après la chute de Robespierre le 9 thermidor (27 juillet 1794), c'est à Figeac que paraît un des premiers journaux thermidoriens , Le Censeur, qui dénonce (en français et en occitan) la Terreur exercée dans cette petite ville. Le Journal du Lot créé à Montauban en août 1796 est concurrencé dès le mois suivant par L'Observateur du département du Lot, premier journal publié à Cahors. La création en novembre 1808 du département de Tarn-et-Garonne, autour de Montauban retrouvant son statut de capitale, fait perdre au Lot près d'un tiers de sa population, et sa partie la plus riche. Napoléon I^er n'autorise qu'un seul journal par département : dans le Lot, c'est le Journal agricole, politique, administratif et littéraire... (1806-1817), émanation de la préfecture.

La population s'accroît régulièrement et se maintient de 1826 à 1881 supérieure à 280 000 habitants (contre 173 000 en 2015) . Le Lot est alors un des départements français comptant le plus grand nombre d'agriculteurs à l'hectare. Ces paysans risquent la misère si leurs récoltes sont mauvaises deux années de suite. L'instruction primaire et l'alphabétisation en français se développent à partir de 1833 grâce à la loi Guizot . Le système électoral sous Louis-Philippe (1 800 électeurs dans le Lot en 1841) nécessite la création de journaux politiques : à gauche Le Progrès (1836) puis Le Radical (1837-1843), à droite la Gazette du Quercy et L'Impartial du Lot (1841-1842). La révolution de février 1848 instaure le suffrage universel masculin , qui multiplie par cinquante le nombre d'électeurs dans le Lot (90 000 en avril 1848). C'est à cette époque que naît L'Écho du Lot (1848-1850) dont la devise est « Ordre et liberté. Organisation du travail et respect aux propriétés ». Son successeur, le Courrier du Lot (1850-1890), lui aussi conservateur, s'oppose au Réformateur (1849-1851), qu'il accuse de propager l'anarchie, et dont le rédacteur Hippolyte Marlet sera condamné à la transportation en Guyane après le coup d'État de Louis-Napoléon Bonaparte . Les conditions de vie s'améliorent dans le Lot au cours du Second Empire grâce à la construction de routes et chemins de fer , et les revenus agricoles augmentent (viticulture, élevage, truffes...). L'opinion lotoise est alors majoritairement bonapartiste, à l'image du Courrier du Lot. Le Journal du Lot, créé en 1861 , soutient le régime garant de l'ordre, comme il soutiendra ensuite, après le désastre de 1870 , le nouveau régime et les suivants jusqu'en 1944 .

Apparu en France vers 1865 dans les environs de Nîmes, Arles et Bordeaux , le phylloxera se répand dans le Lot à partir de 1876 et ruine les viticulteurs, les moins riches étant contraints à migrer vers les villes (voire à émigrer). Toute l'économie lotoise en souffre par répercussion. Pour remplacer la culture de la vigne, celle du tabac, très lucrative, n'est possible qu'avec un permis délivré par les autorités, ce qui installe durablement le clientélisme dans les esprits. À partir de la loi sur la liberté de la presse en 1881, et de l'acquisition par une imprimerie de Cahors d'une rotative Marinoni vers 1890, le nombre de journaux lotois augmente, ainsi que leur tirage, grâce à une baisse du prix qui passe souvent de 15 à 5 centimes (soit un sou , la plus petite dépense possible). Un Syndicat de la presse cadurcienne est fondé à Cahors en 1892, présidé par Louis Laytou qui dirige le Journal du Lot de 1885 à 1897. Une presse catholique naît et se diffuse grâce au réseau des paroisses : La Croix du Lot (1891-1914) puis La Défense (1898-1944), qui atteint un tirage de 7 500 exemplaires en 1913. À Gourdon, en plus du consensuel Gourdonnais (1847-1944), paraissent plusieurs hebdomadaires : Le Petit ralliement du Lot (1886-1887) est anti-républicain, L'Avenir gourdonnais (1888-1939) est radical, Le Vengeur (1893-1894) est socialiste. À Figeac les principaux journaux de la période sont deux hebdomadaires, l'un très neutre, le Mémorial de l'arrondissement de Figeac (1829-1914), et l'autre plutôt conservateur, L'Écho du Quercy (1859-1914). La presse se développe aussi à Saint-Céré à partir des années 1880 et à Souillac la décennie suivante.

Député radical du Lot depuis 1906, Louis-Jean Malvy , ministre de l'Intérieur de mars 1914 à août 1917, est condamné en août 1918 pour son rôle dans la mobilisation en lien avec le journaliste Miguel Almereyda . Les petits journaux du Lot ne survivent pas à la guerre de 1914, contrairement à ceux ayant à Cahors une imprimerie relativement importante comme le Journal du Lot et Le Réveil du Lot. Élie Calmon fonde en 1922 à Cahors l'hebdomadaire La République sociale et est élu député en 1924. Le journal le plus lu dans le Lot devient La Dépêche de Toulouse (9 800 lecteurs et 4 200 exemplaires vendus par jour dans le Lot en 1924). De retour d'exil, Louis-Jean Malvy est réélu député du Lot en 1924 et fonde en 1931 à Gourdon l'hebdomadaire La Gauche quercynoise. Le maire de Cahors, élu du Lot et 18 fois ministre Anatole de Monzie , directeur politique du journal Le Quercy, est un adversaire des langues régionales comme l'occitan défendu à Montauban par Antonin Perbosc .

La signature du Pacte germano-soviétique le 23 août 1939 entraîne l'interdiction de toute publication « de nature à nuire à la défense nationale » (décret du 24 août 1939 ), qu'elle soit communiste comme Notre Quercy ou socialiste comme Le Travail. Sous le régime de l'État français, on lit dans le Lot principalement La Dépêche (Édition du Lot), le Journal du Lot d'Émile Laporte, La Défense du chanoine Viguié (50 000 lecteurs), ou L'Effort paysan publié à Albi et Aurillac (5 000 lecteurs dans le Lot), alors que, dans la clandestinité, des socialistes impriment à Souillac en octobre 1943 Le Lot résistant .

Pour une introduction plus complète à l'histoire de la presse du Lot, voir la préface d'Étienne Baux dans le volume 46 de la Bibliographie de la presse française politique et d'information générale , par Nathalie Fabry (2013).