La presse de la Savoie : pour un aperçu historique

Sous l'Ancien régime, la Savoie dépend politiquement du roi de Sardaigne installé à Turin ; mais pour l'Église catholique, Chambéry dépend du diocèse de Grenoble, en France. Le 21 septembre 1792 à Chambéry, les troupes révolutionnaires françaises s'emparent du duché de Savoie . Annexés à la République française, les territoires des actuels départements de Savoie et Haute-Savoie sont nommés « Département du Mont-Blanc » . Le Journal patriotique de Grenoble élargit son nom le 9 décembre 1792 : Courrier patriotique des départemens de l'Isère, des Alpes et du Mont-Blanc. C'est seulement à partir du 5 juin 1809 qu'un journal est publié en Savoie, à Chambéry : le Journal du département du Mont-Blanc, par l'imprimeur Pierre Cléaz .

Après Waterloo, le traité du 20 novembre 1815 restitue la Savoie au roi de Sardaigne , et de 1816 à 1847 il n'y a qu'un seul journal d'information générale en Savoie, l'hebdomadaire Journal de Savoie, qui en 1843 prend le titre de Courrier des Alpes et durera jusqu'en 1903. Le 1^er janvier 1848 naît L'Abeille savoisienne, puis de nombreux autres journaux éclosent quand la liberté de la presse est accordée le 4 mars 1848 par le roi Charles-Albert dans le Statut albertin (article 28) : à Chambéry La Mouche, La Savoie, Le Chat puis Le Chat des Alpes, Le Patriote savoisien..., à Albertville Le Paysan, La Liberté..., à Saint-Jean-de-Maurienne Jacques Bonhomme... Les actes du gouvernement de Turin sont publiés dans une Gazette officielle pour le duché de Savoie fondée en septembre 1851 et contrôlée par l'Intendant général de Chambéry.

La guerre austro-franco-sarde de 1859 prend fin le 11 juillet après la douloureuse victoire française de Solférino , mais Napoléon III continue de favoriser l'unification de l'Italie, espérant obtenir en échange Nice et la Savoie. Le conservateur Courrier des Alpes, bien que « journal de la Savoie monarchique et constitutionnelle », milite pour ce projet d'annexion de la Savoie par l'Empire français. Cette annexion est également souhaitée par le clergé savoyard, opposé à l'orientation laïque de Camillo Cavour . Les 22 et 23 avril 1860, la première élection au suffrage universel en Savoie demande aux Savoyards : « La Savoie veut-elle être réunie à la France ? » (ni les Piémontais ni les Français ne sont consultés) ; leur réponse est oui à plus de 99 %. Le premier préfet du nouveau département français de Savoie crée en décembre 1861 le Journal de la Savoie, chargé de louer les autorités. Peu de titres naissent sous le Second Empire : à Albertville La Haute-Isère (1860-1863) et Le Propagateur (1865-1871) ; à Aix-les-Bains Micromégas (1863) et Le Courrier d'Aix-les-Bains (1864-1866) ; à Moûtiers La Tarentaise (1864-1867) et Salins, Brides (1865) ; à Chambéry Le Figaro de la province (1868), L'Indicateur savoisien (1869) et Le Patriote savoisien, qui renaît à l'occasion des élections de 1869.

Les nombreux journaux créés en Savoie sous le régime suivant, celui de la III^e République, ne remettent pas en question le rattachement à la France. Négligeant les questions internationales, ils se consacrent certes aux informations locales, mais surtout à la polémique et aux querelles intestines, sans craindre de prendre parti : le Courrier des Alpes (1843-1903) et La Croix de la Savoie (1891-1944) défendent le point de vue conservateur et catholique face aux nombreux journaux républicains comme le Père André (1877-1883), Le Républicain de la Savoie (quotidien, 1883-1895) ou Le Savoyard républicain (1896-1907). Les journaux publiés ailleurs qu'à Chambéry, et dont le bassin de diffusion se réduit parfois à une vallée ou à quelques bourgs, ont aussi une couleur politique : par exemple Le Mont-Cenis diffusé en Maurienne et Le Bon Savoyard de l'arrondissement de Moûtiers sont conservateurs, Le Mauriennais et Le Patriote d'Albertville sont républicains socialistes, etc. Même animosité politique à Aix-les-Bains ; cependant, thermalisme oblige, à la presse locale d'opinion s'ajoute une presse mondaine, politiquement neutre et défendant avant tout les intérêts de la station.

Après la Première Guerre mondiale, la presse savoyarde manque de ressources humaines et financières et commence à décliner lentement au profit des éditions savoyardes de titres lyonnais (Le Progrès, Le Nouvelliste) ou grenoblois (Le Petit Dauphinois). Des Savoyards partis s'installer en région parisienne ou lyonnaise y créent plusieurs journaux d'originaires (non diffusés en Savoie). Cependant, malgré les difficultés, quelques titres naissent entre les deux guerres à Chambéry : Le Réveil des gauches (1922-1931) qui devient Le Démocrate savoyard (1932-1944), La Savoie (1919-1928), Le Pays de Savoie (1928-1944)... ou à Aix-les-Bains : L'Avenir savoyard (1931-1940), La Gazette de Savoie (1932-1936)... L'agriculture et ses problèmes ne sont guère représentés que par Les Quatre vallées d'Albertville, et plus curieusement par L'Action française agricole ou par le Courrier des Alpes : organe agricole des groupements royalistes de Savoie.

Seulement une quinzaine de journaux paraissent encore en Savoie entre 1940 et 1944. L'un d'eux, fondé le 24 janvier 1942, Petites affiches de Savoie et de Chambéry, est le descendant du Patriote savoisien de 1869, qui lui-même reprenait le titre du Patriote savoisien de 1848. L'armée italienne occupe la Savoie de novembre 1942 à septembre 1943 et s'y oppose à la politique répressive anti-juive. Un quotidien est fondé à Chambéry le 21 août 1944 sous le titre de Chambéry-midi, mais il cesse de paraître dès le lendemain car la libération de Chambéry le 22 août 1944 fait place à une nouvelle presse issue de la Résistance.

Pour une introduction plus complète à l'histoire de la presse de la Savoie, voir la préface de Jacques Lovie dans le volume 73 de la Bibliographie de la presse française politique et d'information générale , par Éliane Wetzel (1973).

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Voir aussi : Bulletin bibliographique de la Savoie : 1856 , 1857 , 1858 , 1859 , 1860 , 1861 , 1862 , 1863 , 1864 , 1865 , 1866 , 1867 .