La presse de la Dordogne : pour un aperçu historique

L'imprimerie en Périgord, apparue dès le XVI^e siècle et stimulée par la présence de calvinistes à Bergerac, perd de sa vigueur après la révocation de l'édit de Nantes (1685), puis renaît à la fin de l'Ancien Régime : des Annonces, affiches et avis divers de la province de Périgord auraient paru en 1786. Sous la Révolution, les Affiches de Périgueux deviennent le Journal patriotique du département de la Dordogne, de tendance girondine dans ce département très jacobin. Son rédacteur Pierre Pipaud , accusé d'avoir pratiqué des manœuvres fédéralistes et contre-révolutionnaires dans le département de la Dordogne, sera guillotiné à Paris le 8 brumaire an II (30 octobre 1793). Dans son Journal prophétique en 1792 puis Journal de P. Pontard... en 1793, l'évêque constitutionnel Pierre Pontard publie les prophéties de Suzette Labrousse , citoyenne de Vanxains en Dordogne souhaitant convertir le pape aux idées de la Révolution. En 1794 Lakanal en mission à Sarlat y publie un éphémère Journal d'instruction populaire.

Le Consulat puis l'Empire instaurent en Dordogne le règne des notables. François Dupont fonde à Périgueux en 1806 le Bulletin du département de la Dordogne, hebdomadaire semi-officiel jusqu'en 1828. Des propriétaires terriens publient à partir de 1821 les Annales de la Société d'agriculture... puis Annales agricoles et littéraires... pour diffuser des techniques augmentant les rendements agricoles. Sous la monarchie de Juillet, des journaux durables s'installent non seulement à Périgueux, devenu avant même l'arrivée du chemin de fer (1857) la ville la plus peuplée du département, mais aussi à Nontron (L'Union puis L'Union nontronnaise, 1835-1944), Bergerac (Journal de Bergerac et de la Dordogne, 1836-1944) et Sarlat (Le Sarladais, 1836-1907). Les conservateurs de Dordogne ont pour champion le général Bugeaud , maire d'Excideuil et député de Dordogne de 1831 à 1848, ami de Louis-Philippe qui lui confie la conquête militaire de l'Algérie et du Maroc. À la tête du Mémorial de la Dordogne fondé par Bugeaud, on trouve l'ultramontain Louis Veuillot qui devient en 1843 directeur du quotidien national parisien L'Univers . Bugeaud favorise la carrière d'un natif de Périgueux, Pierre Magne , élu député puis sénateur de Dordogne, plusieurs fois ministre sous le Second Empire et au début de la III^e République.

Parmi les nombreuses feuilles républicaines apparues à partir de 1870, L'Avenir de la Dordogne de Dominique Joucla s'impose comme le grand quotidien républicain du département jusqu'en 1944. De 1899 à 1905 il publie un supplément hebdomadaire à contenu local, L'Avenir illustré . Avant la victoire définitive des républicains en Dordogne aux élections législatives de 1893, bonapartisme puis boulangisme sont les tendances prédominantes (le général Boulanger est élu député en Dordogne en avril 1888). Au début du XX^e siècle, la majorité des parlementaires de Dordogne est radicale, très liée aux loges maçonniques. Le Libre-penseur du Centre est l'organe régional des anticléricaux de 1905 à 1908. À droite, le Journal de la Dordogne (1890-1908) se veut « le centre de ralliement de tous les hommes d'ordre du département ». Le nombre de titres explose à Bergerac et Nontron, et des feuilles se créent même dans des bourgs comme Thiviers, Montpon, Montignac, Le Bugue, etc.

Après la Première Guerre mondiale, les journaux les plus lus sont L'Avenir de la Dordogne et les éditions de Dordogne des titres régionaux imprimés à Bordeaux : La Petite Gironde, modérée, La France de Bordeaux et du Sud-Ouest, radicale, et La Liberté du Sud-Ouest, conservatrice. De nombreux journaux de Dordogne ne paraissent que le temps d'une élection, pour soutenir la candidature de tel ou tel. Le socialisme se diffuse lentement en Dordogne, ainsi que le communisme, y compris rural (à Nontron). Mais le radicalisme reste prépondérant, réunissant les trois quarts des conseillers d'arrondissement et plus de la moitié des maires. Georges Bonnet et Yvon Delbos , députés radicaux de Dordogne, sont plusieurs fois ministres sous les gouvernements de Léon Blum et Édouard Daladier. Mais Bonnet refuse le Front populaire, et les radicaux de Dordogne se font plus modérés.

Dès la mobilisation générale du 2 septembre 1939, les 80 000 habitants du Bas-Rhin (dont 60 000 Strasbourgeois) sont évacués vers le Sud-Ouest, principalement vers la Dordogne. Ce département est traversé par la ligne de démarcation, mais se trouve majoritairement en Zone libre du 25 juin 1940 à novembre 1942. Après la libération de Périgueux le 19 août 1944 qui fait naître de nombreux journaux éphémères, c'est le quotidien bordelais Sud-Ouest qui s'impose comme le plus lu par les habitants de Dordogne.

Pour une introduction plus complète à l'histoire de la presse de la Dordogne, voir la préface de Michel Combet et Bernard Lachaise dans le volume 24 de la Bibliographie de la presse française politique et d'information générale , par Else Delaunay (2013).